Chelles
Gymnase municipal
Agoras périphériques
Au-delà de sa vocation sportive, le projet du gymnase de Chelles a été l’occasion de se servir d’un projet architectural pour résoudre des questions urbaines. Il s’agissait de saisir les opportunités offertes par un contexte extrêmement hétérogène, où se concentrent tous les symboles et les pouvoirs de la ville (l’Eglise, l’Etat, la culture, l’enseignement, le sport), pour que ce bâtiment devienne avant tout un projet d’agora et de centre-ville.
Construire un équipement public, quelque soit l’envergure de son programme, est un événement important pour une commune. À Chelles, la charge symbolique de ce projet est d’autant plus élevée qu’il appartient au nouveau gymnase d’améliorer la lisibilité urbaine du centre-ville. Calée entre la mairie, le collège et un centre d’art contemporain aménagé dans deux anciennes églises par Marc Barani et Martin Szekely, la parcelle dédiée à la construction se situe dans un contexte extrêmement hétérogène où se concentrent de multiples symboles (l’Eglise, l’Etat, la culture, l’enseignement et le sport). Tout y est, mais tout semble davantage juxtaposé que réellement ordonné autour d’une place identifiable. Dès lors, le nouvel équipement doit s’immiscer dans cette densité pour la remodeler et élever l’espace public à l’échelle qui doit être la sienne, celle d’une agora. La composition formelle et l’insertion volumétrique du projet sont faites en ce sens. Comme les choix matériels qui guident son dessin et façonnent son identité, pour qu’il trouve sa place au sein de ce voisinage de caractère.
Implantée parallèlement à la fois de l’hôtel de ville et du collège, la construction cadre par ses deux ailes formant un L un nouveau chemin qui relie le parc public au sud de l’ensemble, au centre d’art contemporain situé à l’opposé du site. L’empreinte du nouveau bâtiment est régulière et franche pour définir précisement les espaces publics, habillés d’un damier des dalles de béton bouchardé et des plaques de béton d’aspect cuivré. Désormais, la piazza et la nouvelle rue piétonne s’imposent avec évidence dans la composition du centre-ville, comme leurs usages et les circulations piétonnes qui les traversent, maintenant fluides. Une fois les volumes en place, l’enjeu devient architectural car installer un équipement sportif en plein cœur de ville oblige à innover dans la forme. Trop souvent les gymnases se résument à des boîtes opaques, sourdes et aveugles au contexte qui les accueille. À Chelles, en s’ouvrant, l’architecture peut participer à la reconstruction d’une cohérence urbaine.
Le bâtiment est réalisé en structure mixte : acier pour la grande salle, béton pour le petit volume regroupant la salle annexe et les bureaux. Le traitement de la façade, constituée de deux couches, est plus original. La première, en verre, laisse pénétrer la lumière naturelle dans la grande salle multisport. La seconde, en cuivre, s’adresse au contexte. Elle colore et magnifie le reflet des immeubles voisins que renvoie la nouvelle façade. Si le rendu est sophistiqué, le complexe technique mis en œuvre est simple. Visible à l’intérieur, une paroi en béton isolée supporte des panneaux de bois fixés entre les montants du mur-rideau. Les plaques de cuivre habillent le verso de ces derniers. Cette double peau assure une isolation acoustique optimale et réduit la résonance dans le gymnase. Vu de l’extérieur, le cuivre qui évoluera du rose au brun, offre une allure précieuse au nouveau bâtiment. C’est un kaléidoscope qui fragmente, diffracte et réfléchit l’image des édifices qui l’entourent pour composer une vision neuve, plus sensible et poétique de la ville. Tandis que son inscription urbaine marque sa présence, la peau du bâtiment crée une ambiguïté. Elle le vide de sa matérialité, jusqu’à le faire disparaître dans une forme de respect face aux institutions qui l’entourent. La nuit, le jeu s’inverse et les lumières de la salle de sports éclairent l’agora.
Client : Ville de Chelles / Budget : 5.3M€ HT / Surface : 2 200 m² + 2 857 m² (aménagement extérieur) / Calendrier : 2008 – 2012 / Équipe : Isabelle Hurpy (HQE), BETEM (TCE)