Lille
Tour Euravenir
Formes inévitables
Dernier projet de la première phase du quartier d’Euralille, la tour Euravenir est une sculpture urbaine qui ambitionne d’articuler les ensembles urbains contigus et de les réinventer visuellement. Sa géométrie, générée par un jeu de prolongement et d’entrecroisement des directions urbaines à l’intérieur de la parcelle, et sa volumétrie, ciselée par réverbération de celles autour, définissent une architecture pluriforme au croisement entre une tour, un immeuble d’angle et un signal urbain.
Complétant l’offre de surface dans la « turbine tertiaire » de Lille, la tour de bureaux Euravenir marque l’achèvement de la ZAC Euralille créée en 1990 à la faveur de l’arrivée de l’Eurostar dans la ville. Construite sur la dernière parcelle libre du projet urbain conçu par Rem Koolhaas, elle constitue l'épilogue de cette grande aventure autant qu'elle en annonce le renouveau puisque la SPL Euralille s’est engagée dans la densification du quartier. Dès lors, l’enjeu formel de sa conception était double : il fallait autant s’inscrire dans le récit conçu par Koolhaas pour ce quartier d’entre-deux gares (Lille Flandres et Lille Europe) que répondre aux objectifs de sa réinvention, comme améliorer la connexion des quartiers Euralille et Saint-Maurice, séparés par les voies ferrées et le périphérique. La position stratégique de la parcelle, située au carrefour des différents axes de mobilité, a conduit à une résolution formelle subtile : la tour est positionnée et ciselée pour devenir une rotule, un point de suture capable d'unir les infrastructures qui gravitent autour en répondant avec attention à leurs échelles et leurs caractéristiques programmatiques particulières. Côté Euralille, la tour élancée achève la perspective visuelle reliant les deux gares. Au nord, le volume bas du rez-de-chaussée gère la liaison avec l’enceinte d’un cimetière. Côté Saint-Maurice, la construction ajuste son volume sur celui des immeubles voisins pour s’intégrer au tissu faubourien. La perception de la construction est multiple : c'est une haute vigie qui domine l’avenue Le Corbusier et un immeuble d’angle qui cadre la place Valladolid. Depuis le boulevard périphérique en contrebas, le signal urbain prend toute sa force, en complétant le décor cinétique imaginé par Rem Koolhaas pour cet « hyperterritoire ».
De cette réponse formelle sophistiquée naît une juxtaposition de plateaux libres aux surfaces réduites (de 200 à 600 m²), organisés autour d’un noyau en béton regroupant espaces servants et circulations verticales. Si la forme semble dicter l’usage, la proposition programmatique répond en réalité aux besoins du quartier, en manque de petites surfaces locatives à proximité des gares pour le personnel mobile des grandes entreprises. Les plateaux offrent un aménagement flexible et peuvent être fractionnés en deux espaces aux surfaces équivalentes. Au rez-de-chaussée, un portique contourne l'interdiction de construire en limite de parcelle pour offrir un hall public ouvert et couvert, une protection aux intempéries où se croisent les usagers des bureaux, les passants et les clients des commerces.
La peau de l'édifice participe à sa distinction dans le paysage vertical d'Euralille. Des panneaux pleins ou perforés de cuivre oxydé – leur teinte est stabilisée – enveloppent la structure poteaux-poutres. Suivant l'orientation, les panneaux perforés ajustent la pénétration de la lumière dans les espaces de bureaux. Comme tous les espaces intérieurs, le dessin des façades est réglé sur une trame principale de 1,35 mètre qui court sur toute la hauteur du bâtiment. Celle-ci est interrompue par des bandeaux qui soulignent la répartition horizontale. Une trame secondaire, déterminée par les dimensions des bandeaux et des trumeaux, ordonne le découpage des façades. Poursuivant le même objectif de mise en relation avec le contexte, ces dernières sont conçues comme un ensemble de fenêtres tournant à 360° sur la ville et donnant à voir sa diversité. Selon l'étage et l'orientation, on profite de la bulle végétale du cimetière et un peu plus loin, du centre-ville historique ou de l'animation du quartier des gares. Achevant le décor imaginé par Rem Koolhaas, cette tour devient alors le meilleur endroit pour le contempler.
Client: SOGEPROM – PROJECTIM / Budget: 5.7M€ HT / Surface: 3 475 m² / Calendrier: 2010 – 2013 / Équipe: Act Environnement (HQE), Egis (MOE Exécution), IOSIS (TCE), Elioth (Façades), Flandres Acoustique (Acoustique)